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L'inflation dans les pays émergents

11/06/2008 - 14:46 - Sicavonline - Allan Conway et Nicholas Field, SCHRODERS



Tout au long de l'année 2007, pendant que se développait la crise du crédit aux États-Unis, il semblait aller de soi que la croissance des pays émergents allait ralentir en 2008. Une seule question se posait : jusqu'à quel point ? Aujourd'hui, en mai 2008, nous nous interrogeons sur l'accélération de la croissance des pays émergents depuis quelques mois. N'est-elle pas excessive ? Ne risque-t-elle pas de déboucher sur une inflation incontrôlée ? Dans cet article, nous nous efforçons d'évaluer l'ampleur des tensions inflationnistes dans les marchés émergents et nous tentons d'évaluer si les banques centrales sont à même d'éviter ou non que l'inflation ne mette en péril la croissance future.

Un peu d'histoire

En 1968, le système monétaire de Bretton Woods de parités fixes entre les devises, inventé à l'issue de la deuxième guerre mondiale, était soumis à d'intenses pressions. Le problème de l'inflation semblait s'inscrire dans la durée. C'est à cette époque que Milton Friedman a formulé son fameux postulat : « L'inflation est toujours et partout un phénomène monétaire, en ce sens qu'elle est et qu'elle ne peut être générée que par une augmentation de la quantité de monnaie plus rapide que celle de la production ». Il aura fallu attendre longtemps, mais ce postulat est désormais universellement admis. Tout au long des années 1970, il s'est pourtant heurté à une forte résistance dans les cercles dirigeants du monde développé. Ce sont au contraire les méthodes keynésiennes de gestion de la demande, de contrôle des prix, de conventions salariales et d'autres méthodes administratives qui furent mises en oeuvre. Dès le début des années 80, pourtant, Paul Volker adopta une politique volontariste de hausse des taux directeurs de la Réserve Fédérale, imposant avec un éclatant succès la politique monétaire comme outil standard de contrôle de l'inflation. Il en alla tout autrement dans les pays émergents. Une crise persistante de l'endettement, l'instabilité politique et l'effondrement de l'Union soviétique ont entraîné en Amérique latine et en Europe orientale des périodes d'hyperinflation. L'Asie, elle aussi, a connu dans les années 1990 des pics d'inflation, mais moins spectaculaires. L'inflation a culminé juste au-delà de 20% en Chine, en 1994, et de 10% en Thaïlande en 1997, juste avant la crise des devises asiatiques. Depuis les années 1990, l'inflation a connu une orientation baissière dans la plupart des pays émergents. Contrairement aux pays développés, cette situation ne résulte ni de la qualité des politiques monétaires des banques centrales ni d'une meilleure acceptation de la théorie monétariste - loin d'être acquises dans bon nombre de pays émergents. Nous aborderons plus tard les mesures de politique monétaire. L'absence depuis quelques années d'un ancrage monétaire clair susceptible de faire reculer l'inflation est devenue une préoccupation majeure maintenant que l'inflation repart à la hausse.

La situation actuelle

L'augmentation significative des taux d'inflation depuis quelques mois ne souffre aucun doute. Le graphique ci-dessous pondère l'inflation apparente dans les marchés émergents selon la pondération de l'indice MSCI.

Variation annuelle de l'IPC globale - Indice MSCI EM

Additionner des taux d'inflation de différents pays selon cette formule n'est pas une méthode idéale. Cette formule montre cependant qu'après une phase de recul puis de stabilisation à un niveau relativement bas, l'inflation réaccélère depuis le milieu de l'année 2007 dans les grands pays émergents. Ce graphique montre le taux d'inflation global, qui intègre les effets des hausses des prix des produits alimentaires et énergétiques. Nous aborderons ultérieurement le débat taux global / taux sous-jacent. En tout état de cause, puisque l'un des principaux facteurs d'amélioration des indicateurs macro-économiques des pays émergents, au cours des dernières années, a été la désinflation, cette évolution est manifestement préoccupante. De prime abord, il semble que les mesures prises aient été insuffisantes. Le graphique ci-dessous affiche les taux réels, une fois de plus pondérés selon l'indice MSCI. Jusqu'à présent, aucune mesure de politique monétaire restrictive n'a été réellement engagée pour contenir l'inflation.

Taux d'intérêt réels - MSCI EM

Pour comprendre ce graphique, et en tirer un sens, il faut étudier plus en détail les statistiques d'inflation mais aussi les mesures prises par les pouvoirs publics.

Causes de l'évolution actuelle du taux d'inflation global

Au cours des dernières années, deux thématiques économiques d'ampleur mondiale et à long terme ont été source de pressions inflationnistes. La première est liée à la demande, la seconde est un effet de la théorie monétaire. Depuis quelques années, la demande de matières premières et produits de base a progressé massivement, parallèlement au mouvement continu d'industrialisation des pays BRIC, et en particulier de la Chine. Nous n'entendons pas détailler ici la croissance à long terme dans les pays émergents, ni ses effets sur les matières premières. Nous pouvons simplement fonder notre raisonnement sur le graphique de la demande chinoise de pétrole ci-dessous.

Consommation de pétrole par habitant

Importations chinoises de pétrole brut

Source : Barclays Capital, Bloomberg La Chine figure aujourd'hui en tête de la liste des pays classés par ordre de croissance marginale de leur demande de pétrole. Nous pourrions d'ailleurs établir des graphiques similaires pour différentes matières premières minérales ou agricoles. Nous estimons que les cinq années qui viennent de s'écouler sont la genèse d'un processus, d'une durée prévue de 30 à 50 ans, de normalisation de la richesse des pays émergents par rapport à celle des pays développés ; nous nous trouvons donc dans ce que l'on appelle le « super cycle des matières premières ». L'offre a du mal à s'adapter à ce choc de demande. À terme, la demande et l'offre finiront par s'équilibrer, moyennant de nouvelles augmentations de l'offre et de la productivité. Ainsi, l'agriculture est sous-productive en Chine et en Inde. Le niveau de productivité y est proche de celui de l'Europe occidentale et des États-Unis au début du XXe siècle. Il y a là une marge gigantesque d'amélioration de la productivité. Mais il s'agit là d'une évolution à long terme. Dans l'intervalle, la normalisation de l'offre et de la demande passera par une forte augmentation des prix. Le problème monétaire est lié à l'assouplissement de la politique monétaire aux États-Unis et à la faiblesse du dollar. Le graphique ci-dessous compare l'évolution du dollar américain pondéré par les échanges en termes réels et l'indice GSCI des matières premières. Depuis l'éclatement de la bulle technologique en 2000, la Réserve Fédérale s'est fixé pour règle une politique monétaire à la fois agressive et flexible. Elle a réduit les taux d'intérêt jusqu'à un niveau de 1%, niveau qu'elle a maintenu jusqu'en avril 2004. Malgré l'augmentation des taux d'intérêt à partir de ce moment, les taux réels ne sont devenus positifs que fin 2005. Grâce à cette politique monétaire, les dépenses de consommation se sont maintenues. En revanche, la récession de 2001 n'a pas coïncidé avec une réduction de l'endettement général aux États-Unis. L'économie américaine a donc perdu une occasion de rééquilibrage, ce qui a sans doute permis le développement d'une bulle immobilière. En effet, les niveaux d'endettement et le déficit de la balance courante sont restés élevés, de même que le volume de dollars en circulation. Il en a inévitablement résulté un affaiblissement du dollar. Or la plupart des matières premières sont cotées en dollars, et de nombreuses devises émergentes lui sont liées : ce laxisme de la politique monétaire américaine s'est donc propagé partout dans le monde. L'effet de la faiblesse du dollar américain apparaît clairement dans le graphique ci-dessous, qui compare les prix des matières premières (d'après un indice composite intégrant l'énergie, les métaux et les produits agricoles) et la courbe inversée du cours effectif du dollar pondéré par les échanges. Pendant les premières années, il n'existe aucune corrélation avérée entre les deux courbes. Cependant, dès l'instant où la Réserve Fédérale entame, en 2000/2001, cette baisse agressive de taux d'intérêt, le dollar commence à s'affaiblir et les prix des matières premières commencent à augmenter, mettant clairement en évidence avec quelle force les effets monétaires influencent les prix des matières premières.

Comparaison d'un indice composite des matières premières et de l’indice inversé du dollar

Nous avons donc constaté des tendances fortes d'inflation pour les matériaux de base. Selon certains observateurs, cette inflation ne devrait pas se transformer en inflation « réelle », autrement dit en inflation des salaires. Il est donc temps d'aborder le débat sur le taux d'inflation global / sous-jacent dans les pays émergents.

Inflation globale et inflation sous-jacente

Dans les marchés développés, il est devenu de pratique normale, pour les dirigeants des banques centrales, de porter toute leur attention sur l'inflation sous-jacente - en d'autres termes, sur l'inflation nette des effets des produits alimentaires et des produits énergétiques. Le raisonnement est le suivant : les effets de prix induits par les matières premières sont exogènes à une économie donnée, causent des effets transitoires et restent sans effet sur le solde de l'offre et la demande monétaire. En 2002, cette théorie paraissait défendable. C'est moins le cas aujourd'hui. L'inflation des prix pétroliers et des prix alimentaires ne semblent vraiment pas transitoires. Leurs effets peuvent paraître exogènes pour certains pays, mais pas pour le monde dans son ensemble ; quant à l'augmentation continuelle des prix, elle est de nature à influencer les attentes inflationnistes et donc les salaires. Tout cela pourrait entraîner des banques centrales à suivre les impulsions données par la BCE et à se concentrer davantage, à l'avenir, sur l'inflation sous-jacente. En outre, même si de nombreux pays émergents ne publient pas de statistiques relatives à l'inflation sous-jacente, les informations publiées par les autres pays montrent que l'inflation sous-jacente progresse également, quoique dans une moindre mesure que l'inflation globale.

Variation annuelle de l'IPC sous-jacent

Le fait de ne prendre en compte que l'inflation sous-jacente dans les pays émergents pose un autre problème majeur. Les produits alimentaires, en particulier, représentent une portion la plus importante du panier de la ménagère que dans les pays développés.

Importance des produits alimentaires

Jusqu'à cette année, l'inflation des prix alimentaires avait été compensée par l'augmentation des revenus, elle-même compensée à son tour par l'amélioration de la productivité. Cette année, l'augmentation des prix a commencé à dépasser celle des revenus. Dès lors, les ménages éprouvent davantage de difficultés à absorber l'inflation des prix alimentaires par un autre poste de leur budget ; l'augmentation des prix des produits alimentaires réduit donc de façon sensible les dépenses de consommation de biens durables par ailleurs. La proportion de la population qui vit au niveau du seuil de pauvreté dans les pays émergents est importante, alors qu'il est pratiquement nul dans les pays développés. Dans les pays émergents, l'inflation du prix des produits alimentaires peut donc littéralement entraîner une famine et déclencher des troubles sociaux et politiques. (Lire l'ensemble du dossier en pièce jointe :

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