Zone euro : l'embellie ne sera-t-elle pas obligatoirement de courte durée ? Il flotte sur les marchés financiers comme un sentiment que la zone euro a enfin touché le fond de la piscine et que le climat économique est voué à s'améliorer. De fait, la zone euro est officiellement sortie de récession au 2e trimestre 2013 à la faveur d'une hausse de +0,3 % de son PIB. La croissance française a au reste surpris par la vigueur de son rebond (+0,5 %). Toutefois, ne faut-il pas se garder d'un excès d'optimisme ? Entretien avec Jean-Louis Mourier, économiste chez Aurel BGC.
La croissance du deuxième trimestre ainsi que les résultats des enquêtes de conjoncture des mois qui ont suivi confirment que la zone euro est, au moins formellement, sortie de récession. Pourtant, et Mario Draghi a pris soin de le signaler très clairement lors de la conférence de presse qui a suivi la réunion du conseil des gouverneurs de la BCE au début du mois de septembre, il convient de rester prudent. Pour l'instant, ces éléments ne font que rendre plus crédible le scénario d'un redressement très progressif de l'activité économique dans la zone euro. Après six trimestres consécutifs de contraction de l'activité, il est beaucoup trop tôt pour parier sur une véritable reprise. Le redressement des indicateurs de confiance des agents économiques est bienvenu et très positif pour les perspectives conjoncturelles, mais ils restent pour l'heure à des niveaux qui ne préjugent pas d'une forte croissance économique dans les prochains mois.
Vous mettez le doigt sur un point important. L'une des limites à la croissance à court terme, qui n'est d'ailleurs pas propre à la zone euro, est que les excès d'endettement du passé n'ont pas été apurés. Il est souvent fait mention des déficits et de la dette des Etats, mais l'endettement des « agents économiques privés », entreprises et ménages a aussi beaucoup augmenté avant la crise et ne s'est pas dégonflé ces dernières années. L'augmentation des exigences des banques vis-à-vis des emprunteurs potentiels, qui -au-delà de l'état de la conjoncture- reflète le durcissement de la réglementation prudentielle pèse sur l'offre de prêt, alors que la demande est aussi contrainte, à la fois par ces conditions plus difficiles et par des perspectives encore peu claires d'évolution des revenus, pour les ménages, ou de la demande, pour les entreprises. C'est incontestablement un élément qui justifie le maintien de prévisions économiques « prudentes ».
En mettant à la disposition des banques de la zone euro des quantités illimitées de liquidités, la BCE a probablement évité le pire, c'est-à-dire un collapsus du système financier. Les différentes étapes d'élargissement du gisement d'actifs bancaires qu'elle accepte en garantie des prêts qu'elle consent aux établissements financiers de la zone euro permet aussi d'éviter un véritable « credit crunch », c'est-à-dire un rationnement quantitatif du crédit ». La BCE a, aussi ramené ses taux directeurs à des niveaux extrêmement faibles. Il est vrai que ces actions ne répondent pas directement aux problèmes qui expliquent la faible dynamique du crédit en zone euro. La Banque Centrale Européenne n'a, de fait, pas les instruments pour relancer, seule, l'offre de crédit aux PME des pays de la zone euro les plus durement frappés par la crise et encore moins pour soutenir la demande de prêts des ménages et des entreprises. Dans ce contexte, la banque centrale espère, par son discours, rassurer les agents économiques (ménages, entreprises, banques et investisseurs) en leur assurant un cadre de stabilité de la politique monétaire et l'assurance d'une aide pour régler d'éventuelles difficultés à sa portée. C'est notamment le rôle de la facilité créée à la fin de l'été 2012, par laquelle la banque centrale s'autorise, moyennant des conditions et critères très précis et exigeants, à acheter des obligations d'Etat sur le marché.
Dans un contexte où les revenus, notamment des ménages sont peu dynamiques, la faiblesse de l'inflation est une bonne chose pour leur pouvoir d'achat. C'est une bonne chose au moins tant que la faible inflation ne se transforme pas en déflation. Ce risque reste faible aujourd'hui pour la zone euro dans son ensemble, mais il n'est pas nul.
Personne, et surtout pas le gouvernement grec, nie que la Grèce aura besoin d'une aide supplémentaire à la fin du programme actuel. L'estimation que tous citent est de 11 Mds d'euros, soit un montant sans commune mesure avec les sommes qui ont déjà été apportées au pays par les Européens et le FMI. Ce « rappel » ne semble pas avoir ému les marchés ces dernières semaines. Sauf en cas de communication mal maîtrisée par les responsables européens, un nouvel épisode aigu de la « crise grecque » est peu probable, d'autant que la sortie prochaine de récession du pays rendra son programme d'ajustement plus crédible. De plus, ce troisième programme pourrait rendre la dette grecque éligible au mécanisme d'achat de titres par la BCE sur le marché secondaire. Plus globalement, les institutions européennes se sont dotées d'instruments destinés à accompagner le retour des « périphériques » de la zone euro sur les marchés. L'Irlande, voire le Portugal, envisagent ainsi de demander une ligne de crédit de précaution du Mécanisme Européen de Stabilité, qui ouvrirait aussi à cet organisme la possibilité d'acheter des obligations de ces pays lors de leur émission et à la BCE d'en acheter sur le marché secondaire.
L'union bancaire verra le jour, mais plus tard qu'initialement prévu. Elle ne sera, de plus, « complète » avant longtemps. Les divergences que vous citez sont autant de freins. Le véritable problème que cela pose est que la volonté initiale de séparer les risques bancaires des risques étatiques semble avoir été oubliée en route. En l'état des projets, les difficultés d'une grosse banque font toujours peser un risque sur les finances publiques de l'Etat où elle exerce principalement son activité.
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