Profits des entreprises - le grand malentendu créé par les indices boursiers (DORVAL AM)

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Francois-Xavier Chauchat Economiste et membre du comité d'investissement de Dorval AM

Les épargnants européens ont du mal à y retrouver leurs petits. On leur parle de reprise économique, mais vu au travers des indices boursiers, les bénéfices par action des sociétés européennes se sont à nouveau effondrés depuis plusieurs mois. Pour l'EuroStoxx50, par exemple, l'estimation des profits par action attendus pour les douze prochains mois a chuté de -10% par rapport à septembre dernier, retombant ainsi à son niveau de la grande récession de 2009.

Alors où se trouve la vérité ? Du côté de ceux qui parlent de reprise ou bien la vision du monde que nous proposent les indices boursiers la reflète-t-elle davantage ? Pour répondre à cette question, nous avons besoin de deux indicateurs. Le premier, que nous fournit Eurostat, mesure les profits économiques de toutes les entreprises du secteur non financier de la  zone Euro. C'est le revenu d'entreprise net, notion très proche du bénéfice des sociétés avant impôt. Celui-ci a augmenté de 18% depuis le point bas du cycle européen de début 2013, et rejoint son plus haut niveau historique de fin 2007.

Le deuxième indicateur nous vient directement des sociétés cotées dans la zone euro. Au sein des 300 plus grandes d'entre elles,  nous avons calculé le pourcentage de celles qui affichent une croissance à deux chiffres de leur bénéfice par action. Ce pourcentage se situe depuis plusieurs mois au-dessus de 50%, au plus haut depuis 2011. Il est en forte augmentation par rapport à début 2013, où il enregistrait un point bas à 36%. De plus, il dépasse nettement la même mesure faite aux Etats-Unis, où le cycle des profits est déjà mature.

Il faut donc se rendre à l'évidence : la reprise des profits en Europe est partout sauf dans les indices boursiers, ce qui, à la lecture des journaux financiers, semble produire un grand malentendu. Deux phénomènes expliquent l'écart de perception. D'abord, les sociétés très exposées à l'économie globale – pays émergents, matières premières, etc. – pèsent très lourd dans les indices. Le ralentissement tendanciel de la Chine et d'autres économies émergentes ainsi que la baisse des prix du pétrole et d'autres matières premières depuis mi-2014 expliquent donc une partie importante de la baisse des profits « indiciels ».

Mais il existe une deuxième cause, plus spécifique à l'Europe : le poids des secteurs zombis, en mal d'adaptation et trop proches des Etats d'une manière ou d'une autre. Ce « Jurassik Park » européen, dont la profitabilité structurelle est fortement compromise par les obstacles que les politiques s'échinent à dresser devant lui, regroupe les secteurs des télécoms, celui des services collectifs, et bien entendu les banques. Ces trois secteurs représentaient presque 40% de l'indice EuroStoxx en 2007. Aujourd'hui ils ne comptent plus que pour 22%... mais c'est encore deux fois plus que sur l'indice américain S&P500.

Pour les épargnants, les implications de ce constat sont finalement assez simples. C'est au travers des paniers de valeurs, ou en investissant dans des fonds gérés sans référence à la composition des indices (comme ceux de Dorval AM…) qu'ils pourront espérer s'y retrouver. Il ne faut en tous cas pas qu'ils se persuadent qu'en investissant dans les indices ils bénéficieront naturellement de la reprise économique.

Francois-Xavier Chauchat
Economiste et membre du comité d'investissement de Dorval AM

François-Xavier Chauchat est un économiste de marché expérimenté qui a débuté sa carrière en 1989 à la Banque Indosuez. Il a ensuite rejoint BNP en 1994 à titre d'analyste du marché obligataire américain puis Cheuvreux en 1997, dont il devient le chef économiste. À partir de 2009, il intègre la société de recherche économique GaveKal Research en tant que chef économiste.François-Xavier est également professeur d'économie à Sciences-Po à l'Université Dauphine. Il a rejoint Dorval Asset Management en début de l'année 2016.

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