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Bourse : ne pas se laisser submerger par l'effet FOMO

11/05/2020 - 13:35 - Sicavonline - La rédac'


 Bourse : ne pas se laisser submerger par l'effet FOMO

Dans cet entretien accordé à Vincent Bezault, Nicolas Chéron, Responsable de la recherche Marchés chez binck.fr, invite les investisseurs à déposer leurs œillères et à ne pas se laisser guider par la seule crainte de rater le train de la hausse, en se convainquant que les banques centrales peuvent à elles seules faire obstacle à un nouveau krach.

Vincent Bezault : Nicolas Chéron, vous êtes responsable de la recherche Marchés chez binck.fr. On a vraiment l'impression en ce moment que beaucoup d'investisseurs sont convaincus qu'en bourse, on gagne désormais à tous les coups puisque si la crise sanitaire et la crise économique sévissent les banques centrales sont là pour faire monter les marchés. D'ailleurs, si n'était pas aussi forte la certitude que rien de grave ne pouvait plus arriver avec la FED et la BCE à la manœuvre, on n'aurait sans doute pas observé un tel rebond des indices depuis mars ni même noté un tel afflux des particuliers sur les marchés boursiers ces dernières semaines, car ce retour des particuliers à l'achat est là aussi une des données marquantes de la période actuelle, et on sait qu'il est parfois un signe d'alerte en lui-même. Quoi qu'il en soit, est-ce que vous aussi vous avez le sentiment qu'aujourd'hui en bourse on ne peut que gagner ? 

Nicolas Chéron : Ce n'est pas mon sentiment mais c'est le message que l'action des banques centrales à contribuer à diffuser, que ce soit d'ailleurs auprès des particuliers comme des professionnels. En 2019, nous avions déjà observé leur omniprésence et la façon dont les banques centrales pouvaient tenir les marchés. Cette fois, elles les font remonter malgré une crise économique et sanitaire historique, une baisse du PIB américain de 4,8 % pour son premier trimestre, et on sait que ce sera encore pire au deuxième trimestre. On a donc des marchés qui, somme toute, ont repris leur marche forcée soutenus par des liquidités et l'impression, je dis bien l'impression, que ce sont des marchés qui ne peuvent pas redescendre.

VB : Des marchés qui ne peuvent pas baisser, comme vous le dites, mais qui dans le cas par exemple du Nasdaq 100 sont même retournés en tendance haussière...

NASDAQ 100

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NC : Effectivement, le Nasdaq 100 est pratiquement le seul indice de la planète qui a gardé sa tendance de fond haussière à long terme, comme on peut le constater sur le graphique ci-dessus. Nous avons fin 2019 début 2020 réalisé une période de hausse quasi parabolique. Je considère cette période-là comme une période d'euphorie, or vous savez que les marchés haussiers naissent dans le pessimisme et meurent dans l'euphorie, donc, pour moi, on était effectivement sur un plus haut de marché potentiel. Suite à l'accident boursier causé par le Covid-19, le Nasdaq-100, comme les autres indices, a baissé de 30% mais grâce aux injections de liquidités et à l'activité sectorielle des sociétés qui composent cet indice leur permettant d'afficher des chiffres relativement corrects, l'indice Tech est revenu sur des plus hauts.

VB : Vous parlez des sociétés américaines de technologie bien évidemment.

NC : Oui, Netflix notamment qui a profité par exemple d'un nombre d'abonnés croissant puisque nous étions tous enfermés à la maison, de Facebook, de Google pour ne citer que ces sociétés. Cependant, à l'étude des publications récentes, on voit bien qu'il y a des craintes de baisse d'activité et de résultat net ce trimestre et les trimestres prochains, mais pour le moment, on a l'impression que les marchés font complètement fi de ces risques à venir grâce encore et toujours à l'omniprésence des banques centrales.

VB : Comme je le mentionnais au tout début de cet entretien, on assiste à un afflux des particuliers, afflux constaté par l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) qui dans un rapport d'avril 2020 relève qu'en six semaines, du 24 février au 3 avril, 580 000 investisseurs particuliers ont acheté des titres de sociétés du SBF 120, indice français des 120 premières sociétés cotées. Parmi ces 580 000 personnes, on compte plus de 150 000 nouveaux clients, c'est-à-dire des personnes qui n'étaient pas présentes sur les marchés actions les deux années précédentes. Par ailleurs, l'achat d'actions françaises par les particuliers a été multiplié par quatre en mars 2020. Généralement, lorsque les particuliers arrivent en force, c'est souvent qu'il est trop tard. Est-ce que du coup cette suractivité des particuliers vous inquiète ?

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NC : Généralement, les entrées de particuliers sont plus significatives à la fin de périodes positives sur les marchés ou à l'occasion des premiers accidents avant une chute plus importante. C'est ce que nous avons constaté en l'an 2000 et en 2008. Alors que nous avions atteint des sommets, les marchés ont perdu à 20 à 30% et on a noté à ce moment-là des entrées massives de particuliers qui ont profité de rebonds présents pendant les quelques semaines précédant l'installation de la crise, et a mise en place de marchés baissiers plus importants. Donc, le fait de voir autant de particuliers intervenir sur les marchés, profiter de la hausse à court terme, et penser que les marchés ne peuvent plus baisser est relativement inquiétant et je pense qu'en plus ce phénomène a été exacerbé par le confinement, l'ennui et la volonté de faire des choses sur les marchés financiers. On a donc des particuliers qui grâce aux banques centrales se sentent indestructibles. On a une parfaite illustration de ce phénomène avec les positions sur Tesla, représentées sur le graphique ci-dessus par le nombre de traders américains du courtier Robinhood passés à l'action sur ce titre. On constate qu'énormément d'investisseurs achetaient Tesla dans la phase haussière mais ne sont pas sortis quand la valeur a commencé à chuter. Ils n'ont pas pris leurs bénéfices. Et preuve qu'il n'ont pas eu peur puisqu'ils sont restés acheteur dans des proportions assez importantes et ont continué dans d'acheter Tesla de nouveau la hausse. Résultat : tout le monde se retrouve acheteur de Tesla, tout le monde gagne de l'argent, tout le monde se sent indestructible. Je pense que c'est un phénomène de court terme et quelque chose d'assez dangereux. Ces particuliers ne sont pas forcément éduqués à la gestion du risque et rompus aux techniques permettant de limiter la casse telles que les « stops » et si l'on se dirige, comme que le crois, vers une crise bien plus longue que les deux mois que l'on a passés, on pourrait connaître à nouveau des phases de chute sur les marchés, sur les actions, et donc, tous ces particuliers entrés dernièrement pourraient se faire « rincer ».

VB : il y a un point qu'il faut souligner, c'est la relative jeunesse de ses nouveaux investisseurs, ils sont de 10 à 15 ans plus jeunes que les investisseurs habituels, et je vais faire le lien avec ce que vous venez dire à propos de Tesla aux Etats-Unis. On voit que sur la place de Paris ces nouveaux investisseurs peu expérimentés semblent plébisciter un certain nombre de valeurs dites "coronavirus". Ce sont pour certaines d'entre elles des actions que l'on recommanderait plutôt à des investisseurs avertis, parce que ce sont des titres de jeunes entreprises qui ont encore beaucoup à prouver, des titres qui de surcroît, comme Tesla, affichent des valorisations très élevées...

NC : Oui, effectivement. On a beaucoup plus de traders jeunes, sans doute ces mêmes jeunes investisseurs qui se sont intéressés notamment au crypto-monnaies ces dernières années. Ces investisseurs recherchent de la volatilité, or, les plus volatiles de ces valeurs étaient les valeurs coronavirus. Prenons pour illustrer mes propos, la valeur Novacyt. Novacyt est une très belle société, spécialiste des diagnostics. Elle a créé des diagnostics du Covid- 19, ce qui lui confère un beau potentiel. Simplement, cette action est passée de 0,05 centimes à 5 euros, soit x 110 / 120 en l'espace de quatre ou cinq mois, cela me rappelle un peu les crypto-monnaies en 2017 quand tout montait à toute vitesse avec volume, et que tout le monde disait que ça continuerait de monter ad vitam aeternam. On observe ici un phénomène identique. Tout le monde est à l'achat. Tout le monde est positif, les cours montent fortement et plane un sentiment d'invincibilité très important. Or ces actions sont en train de plafonner, ce sont des actions très volatiles, ces traders n'ont généralement pas d'éducation au trading et à l'investissement, au money management et au fait d'utiliser des stops de protection.  Je crains que si ces valeurs coronavirus ou même l'ensemble des marchés boursiers repartent à la baisse, ces traders se retrouvent bloqués à l'achat en fortes pertes, un petit peu comme les derniers entrants qui avaient acheté des sociétés avec .com à la fin en l'an 2000.

VB : Cet engouement des particuliers pour la bourse et cet afflux de nouveaux investisseurs, est-ce qu'ils ne sont pas les marques, les symptômes d'une capitulation à la hausse ? Et on sait généralement qu'une capitulation à la hausse où tout le monde rentre dans le marché de peur de rater le train, c'est d'habitude ce qui précède une fin de cycle boursier ou des phases plus douloureuse.

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NC : Effectivement, on peut d'ailleurs le voir sur le graphique. Lorsque le CAC 40 fin 2019, début 2020 est parti à la hausse puissamment et a dépassé les 6000 points, on a atteint ce que l'on appelle un phénomène d'euphorie, de sur-optimisme, de confiance exacerbée. On avait à cette époque-là, je le rappelle, toute confiance dans l'omniprésence des banques centrales et le fait que les marchés ne pouvaient pas baisser. C'est un petit peu le même phénomène auquel nous assistons ces dernières semaines, c'est-à-dire que le CAC 40 a gagné 30 %, le S&P 500 35% et les marchés américains montent d'une manière linéaire. On est donc en train de passer d'un marché de peur à de l'euphorie à court terme. A nouveau dans la presse et sur les réseaux sociaux, on a ce sentiment de soutien et que cette hausse forcée est possible. Je pense que c'est un piège. Quand on observe le CAC 40 sur les dernières années, on voit bien que le jouet semble cassé, c'est-à-dire qu'avant, on était dans une dynamique de fond haussière et cette dynamique a été violemment rompue. La hausse à laquelle nous assistons est ce que les Américains appellent, the dead cat bounce, en français le rebond du chat mort, nous on parle de rebond technique, c'est-à-dire un mouvement haussier qui s'inscrit dans une dynamique désormais baissière. Donc, à court terme on monte tout droit, les investisseurs passent à l'achat, les débutants achètent à tout va et pensent que, de toute façon, tout va bien se passer, mais je pense qu'on va très rapidement être rattrapés par la réalité, c'est-à-dire par les perspectives du 2ème trimestre, par les risques récessifs, par un risque de deuxième vague du coronavirus. Pour la petite histoire, il y a un mois et demi, j'ai expliqué à mes clients et à mes lecteurs qu'on allait très certainement repasser de 3 600 à 4 620 points et que quand on allait arriver à 4600 points, on allait avoir un sentiment que la crise est derrière nous, que c'est une crise peu profonde et qu'on allait repartir comme en 40, que ce soit sur les marchés où que ce soit sur l'économie, et j'expliquais à ce moment-là que si l'on arrivait vers 4 600, 4 700 ou 4 800 points, il faudrait réussir à prendre du recul sur la situation, comprendre les risques de moyen-terme et non pas se dire "on est indestructible et on peut gagner à tous les coups" mais plutôt profiter de cette hausse pour prendre des gains, pour sortir des positions, pour alléger les portefeuilles et pour laisser une crise un peu plus profonde se mettre en place. Et ces dernières séances, c'était vraiment exceptionnel, parce qu'on a cassé les 4 600 points, on a eu l'impression que tous les marchés repartaient à la hausse, tout le monde sur les réseaux sociaux, les forums et même dans les analystes et à la télé disait "bon, et bien, on est reparti comme en 40, les banques centrales sont là, le marché est haussier, la baisse est terminée, la crise est derrière nous, je pense que c'est un leurre. On l'a vu, la BCE ne nous a pas aidés à continuer de monter, la FED et la BCE sont un petit peu à court d'idées, elles ont déjà fait énormément, elles nous disent qu'elles sont là et qu'elles ont des munitions illimitées mais ça ne semble plus suffisant pour qu'on continue de grimper et je pense que l'on va assister à une sorte de retour sur terre, de conscientisation de la crise et de sa profondeur et que ne nous sommes pas à l'abri de nouveaux accidents baissiers et d'un retour du CAC 40  vers les 4 000 points plutôt que les 5 000.

VB : Dans ces conditions, Nicolas, à quel niveau vous portez-vous acheteur ?

NC : Tout dépend si l'on parle de profils d'investisseur de court-terme, de moyen-terme ou de long-terme. Je pense qu'en ce moment les investisseurs de long terme ont envie d'acheter des actions et veulent profiter des « promotions ». Simplement, à mon sens, on est déjà trop haut. Quand on regarde les graphiques et quand on voit ce qui se passe en termes de macroéconomie, je pense que nous ne sommes pas au bout de nos peines. J'anticipe plutôt une récession profonde et donc un retour du CAC 40 en direction de ses plus bas. Quand on regarde les graphiques de très long-terme sur les trente dernières années, la zone comprise entre 3 000 et 3 500 points serait une zone historique d'intérêt sur laquelle justement on pourrait se placer à l'achat et garnir son PEA. D'ailleurs, j'invite les débutants qui nous écoutent à y penser à deux fois avant de garnir trop vite leur PEA. Il y a beaucoup de gens qui ont, pendant le confinement, ouvert des comptes pour acheter des actions et qui voient les actions remonter ces trois quatre dernières semaines et qui, du coup, se forcent à acheter parce qu'ils ont l'impression que la crise est derrière nous, que les marchés ne peuvent que monter et donc qu'ils doivent en faire partie. On appelle ce phénomène le FOMO, le the Fear Of Missing Out, c'est-à-dire la peur de manquer le mouvement. J'invite ces personnes dans cette situation à regarder ce qui s'est produit par le passé notamment en 2000 et en 2008. Souvent les rebonds ne sont que des rebonds techniques avant des rechutes et s'il faut attendre 3 mois, 6 mois ou 9 mois supplémentaires pour pouvoir payer 20% moins cher, je pense que cela vaut vraiment le coup de patienter, de s'attacher les mains, et de ne pas rentrer sur ses marchés en pleine crise.


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